Akofena, Hors-série n°03, Mai 2023 [pour télécharger]
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D.O.I:
Coordinateurs
DODO Jean-Claude (Université FHB – Côte d’Ivoire), ADICO Patrice (Université FHB – Côte d’Ivoire) & ALADE Jean-Jacques (Université FHB – Côte d’Ivoire)
Éditorial du numéro
L’héroïsme se structure sémantiquement et empiriquement au cœur d’actions d’éclat et de portée générale qui tranchent avec la commune mesure, pour se hisser dans l’auréole de l’ineffable. Les mythes et légendes, puis l’histoire des hommes ont connu des héros de dimensions surhumaines aux parcours extraordinaires, et qui ont joué des rôles déterminants au sein de leurs communautés respectives. Tantôt divinisé (Atlas, Arès, Homère, Hermès…), quelquefois mi-homme mi-dieu (Achille, Ulysse, Hector, Héraclès…), d’autrefois, simplement humain (César, Arthur, Œdipe…), le héros l’emporte toujours ou presque sur la mêlée générale et les forces négatives qui oppriment et détruisent les relations et l’harmonie au sein des groupes sociaux au prix d’une épiphanie sacrificielle.
La figure romanesque/littéraire qui consacre le héros tire avantage des confins, des mystères et des largesses d’une tradition héritée des légendes, des mythes (mythologies gréco-latine, indienne…), de l’histoire des peuples (grec, latin, indo-européen, prussien…) pour ouvrir sur une typologie variée, une taxinomie spontanée et une critériologie rituelle.
Si le XVIIIè siècle littéraire n’embrigade pas l’héroïsme romanesque dans une iconoclastie radicale, il est le réservoir de l’histoire à partir duquel se dessine une avalanche de figures jeunes en action au sein des récits. Qu’ils soient littéraires ou philosophiques, ces récits se construisent autour et avec des personnages relativement jeunes et en mission dans l’antre d’une société souvent étrange ou étrangère. Ces espaces a priori problématiques informent une série de découvertes qui ne font pas mystère des trajectoires chaotiques ou accidentogènes des héros-jeunes : Julie ou la Nouvelle Héloïse, Candide, Zadig, Jacob, le chevalier Des Grieux ou Manon Lescaut…
En fin de siècle, la littérature allemande, avec Goethe (Les Années d’apprentissage de Wilhelm Meister – 1794-1796), et Schlegel, initie de nouvelles figures du héros jeune et forge la notion de bildungsroman[1]. Le pendant en France donne le roman d’apprentissage, ainsi que ses variantes (roman de formation ou d’éducation…). Il naît alors une série de romans forgés autour de la notion de quête de soi problématique au sein d’un siècle troublé et à l’intérieur de sociétés, pour la plupart, en devenir. Les expériences sont nombreuses et prennent la forme d’initiations diverses aux différentes sources de connaissance, de vitalisation ou de cooptation sociales ; ainsi qu’à toutes formes de virtualités présentant un attrait quelconque d’actualisation de potentiels… Werther, puis Wilhelm marquent l’histoire allemande d’une forte empreinte d’expériences juvéniles inédites qui se répandent sur l’ensemble de l’Europe. Cette esthétique nouvelle gagne davantage la littérature française dont la connotation romantique prend de l’ampleur avec la mise en relief de personnages tels Frédéric Moreau, Charles Bovary, Renée, Julien Sorel, Octave, Lucien de Rubempré, Eugène de Rastignac…La spécificité de ces personnages est d’incarner une jeunesse de son temps, résolument marquée par le souci de l’intégration sociale. La rhétorique descriptive et la verve narrative jouent de la relative jeunesse de ces personnages fragiles et vulnérables à peine sortis de l’enfance, le plus souvent d’origines minces (classes roturière, ouvrière) et jetés dans l’enfer d’une société d’intérêts : support de son apprentissage…Ces personnages jeunes sont confrontés à l’illusion d’une réalisation qui emprunte diverses trajectoires dont les plus cruelles sont l’abîme, la désillusion, l’amertume, le désespoir, l’abandon ; et quelques rares fois, la félicité d’une réussite, diversement variée… Ces personnages ressassent à travers expériences et vécu, le socle empirique des générations des époques qu’ils traversent. Ils étreignent avec ceux-ci, les souvenirs ou expériences heureux ou malheureux, dans les champs aussi divers de l’amour, de la joie, de la pauvreté, de la déception, de la naïveté, de la croyance, de l’abondance ou de la rareté…Toutes choses qui jalonnent l’espace de l’apprentissage.
Le jeu romanesque manipule les personnages, les espaces, le temps et se prête comme sources inépuisables d’exploitations esthétiques au prorata desquelles les romanciers leur assignent des fonctions particulières au cours de ces expériences de formation-apprentissage du jeune-héros dont la candeur, les premiers balbutiements de succès, ou d’échec créent un attachement singulier dans le contrat de lecture. Dès lors que celles-ci sont liées à la question du mal du siècle (au XIXe siècle) entendue comme un rêve d’héroïsme fatalement condamné à la marginalité, à la nostalgie d’une jeunesse sacrifiée, angoissée par la montée prématurée de la flétrissure, et au dégoût de l’existence, ces jeunes personnages confinent à une empathie constructive. Le vingtième siècle interroge la place de la formation-apprentissage dans le parcours du héros jeune. En effet, au moment où les droits de l’homme prennent le pas sur un certain nombre de pratiques sociales, il est à se demander quelles figures sustenteraient la formation du héros jeune dans les récits. La mise en crise de cette notion apparaît donc inévitable dans la création littéraire… Déjà à l’œuvre au XIXe siècle avec Jules Vallès (L’Enfant, L’Insurgé, Le Bachelier : trilogie des Mémoires d’un révolté), la souffrance du héros épouse plusieurs formes dans les liens complexes de la relation familiale, des fréquentations sociales, à l’intérieur de l’expérience sentimentale et de la formation, dans la quête d’affirmation et de réalisation. C’est un père qui pèse par un autoritarisme déchaîné et une brutalité suffocante (Julien Sorel,…), une mère, voire une responsable de couvent, ou de famille d’accueil qui lacère la conduite d’un personnage trouvé indélicat ; ou encore, une relation sociale qui en impose par le charisme et l’éducation (Vautrin). Jean Paul Sartre ou Marguerite Duras reviennent sur ces questions d’une enfance douloureuse et pervertie par les parents, « tuteurs légaux » et/ou circonstanciels (familles recomposées), et la plupart du temps, perdue dans la perspective de la quête de réalisation sociale qui hante tout esprit jeune…siècle. Le héros jeune présente ainsi un profil protéiforme qui, du XVIIIe au XXIe siècle, gît au sein de nombreuses sociétés d’accueil sans jamais pouvoir se frayer une voie authentique, linéaire et structurée d’actions centrées sur la quête de soi. Entre mythe, légende et conventions, ce dernier se retrouve, au final, comme pris dans l’étau d’un déterminisme historiquement contagieux, de désagrégation, de déchirement et d’appauvrissement mis au service d’un dépérissement sévère de l’héroïté dans le jeu esthétique.
L’importance de cette thématique dans les préoccupations littéraires a suscité, ici même à Korhogo, un livre collectif, à notre initiative. En suivant la chronologie des exemples retenus, le lecteur remarquera qu’une extraordinaire effervescence créatrice donne corps à un nombre important du mythe. Des figures héroïques nourrissent toujours la culture de masse à travers la littérature, le septième art, la bande dessinée… Elles projettent chacune une histoire et des caractéristiques essentielles que l’on découvre dans ce livre collectif. Ainsi, d’un auteur à un autre, le thème est perceptible par des conceptions ou variations lui donnant des apparences toujours nouvelles. Comme le sujet traité l’imposait, les auteurs des articles rassemblés ici sont généralement de formation littéraire ; cependant, les méthodes d’approche ne sont toujours les mêmes. Sessia Inesse Bohoun propose du héros juvénile une image vivante de faiblesse humaine capable de se reconnaître et de se retourner contre elle-même dans un geste de liberté désespérée. Comme Oedipe dont la moralité pourrait paraître douteuse, le Vicomte de Valmont dans Les liaisons dangereuses de Choderlos De Laclos est défini comme le héros érotique le plus emblématique des personnages libertins des Lumières. Ancien amant et complice de la marquise de Merteuil, il a la particularité d’être beau et de mener une vie de libertinage amoureux. Pour lui, la femme est une proie que l’on dérobe à l’autre autant qu’à elle-même. Analysant Ruy Blas de Victor Hugo, Simplice Nogues Godo part du postulat que l’espace dramatique est susceptible de jouer un rôle majeur dans la lisibilité du mythe. Dans ce drame romantique, écrit en cinq actes et en alexandrins où des personnages tentent vainement d’échapper au destin fatal auquel ils sont soumis, le critique détermine le palais royal et la sombre petite chambre tels des trajectoires à la fois tragique et génératrice d’héroïsme ; car, la représentation scénique des relations entre les personnages favorise la confidence personnelle du héros.
L’analyse de Gnagny Pedro Kennedy articule les héroïsmes épique et chevaleresque courtois dans Antara de Marcel Devic. À partir de cette grande épopée du milieu du XIXe siècle, l’on retient que l’héroïsme épique arabe, contrairement à celui de l’Occident, ne s’offusque ni de l’amour ni de l’abnégation pour la femme. L’interaction entre Antar et sa communauté puis avec la gente féminine participe de la création d’un héros hybride, défiant les canons classiques de l’héroïsme épique. Louis Briga, quant à lui, recourt à la stylistique interprétative de Georges Molinié pour opérer une caractérisation de quelques référents du personnage de Jean Peyral dans Le roman d’un spahi de Pierre Loti. Stéréotypique, la référentialité discursive du jeune héros venu des Cévennes n’est qu’un prétexte énonciatif pour Loti dont le sens du discours consiste à peindre intentionnellement en noir le tableau primitiviste de l’Afrique. Son analyse aboutit à la conclusion que le héros ne se définit pas nécessairement par des qualités morales objectives mais pourrait aussi se singulariser, à ses contemporains, par une différence insolente. En atteste la contribution significative de Marc Arthur Sémien qui étudie le parcours héroïque de Raphael de Valentin dans La peau de Chagrin d’Honoré de Balzac. Ce héros dont l’existence est terrifié par le pouvoir d’une peau qui emporte avec elle des fragments de sa jeunesse est voué au même désespoir qui ronge ses « frères » de La Comédie humaine : Vautrin et ses élèves Rastignac et Lucien de Rubempré. Il doit, en effet, combattre sa nouvelle dépendance, pour éviter l’accomplissement de cette étrange et inquiétante prophétie. Le désenchantement des personnages du monde parisien de la fin du XIXe siècle revient sous la plume de Wato Pierre Lieu qui fait l’apologie d’Eugène De Rastignac de Balzac et de Georges Duroy de Maupassant respectivement dansLe père Goriot et dans Bel-Ami. Incarnant parfaitement leur époque, ces jeunes héros se caractérisent par leurs charismes et par leurs génies : beaux, élégants et bien éduqués, ils plaisent aux femmes et se servent de leur charme pour se hisser au sommet de la « bonne société ». Les infamies et les faiblesses secrètes de ces « jeunes loups aux dents longues » confirment l’idée qu’un héros n’est pas toujours un homme de bonne foi ou un immaculé. Cependant, il y a toujours, dans la figure du héros juvénile, quelque chose de solaire et d’éclatant que j’exprime en mettant en lumiere le devouement et la probité des jeunes domestiques dans l’oeuvre de Jules Verne. L’épiphanie héroïque de ces compagnons fidèles se caractérise par leurs rares vertus dont on pourrait faire un rapprochement chez Platon pour qui l’héroïsme est une ardeur généreuse, un geste d’amour. En effet, ce philosophe illustre considère dans Le Banquet – à partir d’Alceste qui consent de mourir pour son époux – que la racine du mot héros « hêrôs » est de la même origine que celle qui désigne l’amour « êrôs ». Il s’en suit que l’héroïsme se manifeste dans un geste d’amour, par le sacrifice, par la peine qu’une personne se donne à secourir ou à aider autrui.Invitant à suivre le parcours de Birahima dans Allah n’est pas obligé d’Ahmadou Kourouma, l’article d’Anoh Brou Didier corrobore assez clairement le sacrifice du héros type. L’analyse fait état de la force de caractère et de la bravoure témoignant qu’ « un homme n’est pas plus qu’un autre s’il ne fait pas plus qu’un autre »[2]. Très tôt affranchi de la tutelle parentale, Birahima se rebelle contre les modèles figés imposés sa société. À l’image d’autres enfants engagés comme combattants dans des guerres civiles africaines, son parcours préfigure le prototype de l’enfant soldat dans les écritures africaines postcoloniales. Il se structure alors au coeur d’un combat, d’une lutte sociale ; mais, ses vertus restent diverses et quelquefois antagonistes comme le prouve la réflexion de Kouakou Brou Médard portant sur un film d’Anton Vassil intitulé Le gendarme d’Abobo. À partir d’une oeuvre cinématographique comique réalisée en 2019, le critique fonde son argumentation sur des théories en lien avec la transposition filmique pour en cerner la double posture du personnage principal. Selon lui, l’Adjudant-chef Gohou concilie deux pôles axiologiques opposés : il est tantôt anti héros, tantôt personnage héroïque. Il reconsidère ainsi le caractère ambivalent du héros que Boussou Amany Hypolite reprend dans son article intitulé : « Le héros-jeune : histoire, expériences et avatars esthétiques dans Le monde s’effondre de Chinua Achebe». À travers une approche sociocritique fondamentalement imprégnée par un imaginaire de l’échec, de la fatalité et de la tragédie, le chercheur décrit la courbe de l’ascension fulgurante d’Okonkwo parmi les siens qui se solde malheureusement par une déperdition ; voire, une chute vertigineuse conduisant à la mort par pendaison. La figure héroïque connaît un dépérissement critériologique faisant comprendre que toute : « histoire d’une vie, quelle qu’elle soit, est l’histoire d’un échec ». (J. P. Sartre, 1946, p. 561). L’étude du héros juvénile choukrien et des avatars de la sexualité de Kessé Edmond N’Guetta revient sur la déchéance morale du héros littéraire. Le pain nu explique bien cette dévaluation dans la mesure où il met en scène un jeune héros traîné dans toutes les foires de la vie. Avili par unesexualité déviante, celui-ci se retrouve appauvri, dépossédé de sa riche signification.
La contribution de Nounangnon Judith Bidouzo Sognon-Des revele que l’héroïsme chez Hampaté Bâ a un fondement ésotérique, spirituel et religieux. En effet, son analyse conçoit une typologie de heros dont le profil permet de lire un idéal de vie sociale et politique à l’arrière-plan duquel se perçoit tacitement une intention d’enseigner par des symboles inspirees de la tradition orale. Boadi Désiré Ano et Roger Kpan Gueu, quant à eux, partent du postulat qu’il existe un roman africain postmoderne dont les spécialistes fondent l’essence, l’identité et l’esthétique autour d’une rupturisation globale des formes d’écriture. Aussi soumettent-ils à un jeu de l’étrangeté, de la délégitimation héroïque et de la fragmentarité, le héros de Verre Cassé d’Alain Mabanckou. Leur analyse atteste la postmodernité actorielle et l’adhésion du héros à la rupturisation des codes classiques. Sympathique et déroutant, leur corpus présente une identité archipélisée du héros romanesque et succombe aux artifices de l’intermédialité. Dans « La mort programmée du héros dans le roman de Thierno Monénembo… », François Konan Koffi abonde dans le sens d’une réécriture du héros romanesque juvénile en crise. Son héros est un adolescent en déclin dont le jeu actoriel procède d’une addiction à la parodie, à la caricature et au simulacre.
Pour sa part, Kpatimbi Tyr recherche les formes récentes de l’héroïsme dans la littérature francophone au Sud du Sahara. Son analyse s’appuie sur L’Initié d’Olympe Bhêly-Quenum. Les héros qu’il dépeint possèdent des caractéristiques des héros grecs antiques : Djessou symbolise l’obscurité, le Mal tandis que Marc Tingo la lumière, le Bien. Pendant le combat qui les opposent, Marc Tingo trouve l’occasion de se dépasser ; parce qu’il est doté d’une vision rationaliste lui permettant de se maitriser, de garder son flegme, de se démarquer par une valeur extraordinaire. Timbo Adler YRO se sert d’une approche géocritique pour traiter la chronosémie figurative du héros dans l’œuvre de Véronique Tadjo. Il montre que les héros de cette auteure incarnent des rôles qui convolent en juste noce avec des personnalités de la vie réelle.Enfin, Mawa Romaine Sondjo présente le théâtre populaire béninois comme un héros national du fait des événements majeurs, en rapport avec la vie socio-politique, qu’il a représentés et des trophées que ses troupes et comédiens ont remportés. Elle en vante le parcours exceptionnel montrant sa capacité d’adaptation, ses formes variées ainsi que ses contenus divers avant de s’appesantir sur ses implications dans la consolidation d’une nation indépendante. Prenant appui sur la méthode sociocritique, cette auteure se donne pour objectif de mettre en relief le caractère héroïque de cette forme dramaturgique de type naturaliste, à la fois traditionnel et moderne qui se pérennise depuis des décennies, en dépit des difficultés rencontrées par ses praticiens.
[1] Hendrik Van Gorp et alii, Dictionnaire des termes littéraires, Paris, Honoré Champion, 2005, p. 425, « ce roman est un type qui dépeint l’épanouissement intérieur d’un personnage, de l’enfance à la maturité. Cet épanouissement adopte plusieurs formes, qui donnent lieu à autant de sous-genres : l’« Entwicklungsroman » – le développement d’un personnage – ; l’ « Erziehunghroman » – l’éducation ou apprentissage, le « Künstlerroman » – la formation artistique. Le « Bildungsroman » – la formation sociale » est le mode accompli du genre ; il souligne le poids du milieu : le contexte socio-culturel, la famille, les amis ou relations, le vécu sentimental ou autre ».
[2] Propos de Don Quichotte s’adressant à son valet Sancho Cf. Miguel De Cervantès, 1605, L’Ingénieux Noble Don Quichotte de la Manche Madrid, La Bibliothèque électronique du Québec, Collection « À tous les vents ».
Heroism is structured semantically and empirically at the heart of actions of brilliance and general scope that stand out from the commonplace, rising to the halo of the ineffable. In myths and legends, and later in the history of mankind, heroes of superhuman dimensions and extraordinary journeys have played decisive roles in their respective communities. Sometimes divinised (Atlas, Ares, Homer, Hermes…), sometimes half-man half-god (Achilles, Ulysses, Hector, Heracles…), sometimes simply human (Caesar, Arthur, Oedipus…), the hero always or almost always prevails over the free-for-all and the negative forces that oppress and destroy relationships and harmony within social groups at the cost of a sacrificial epiphany…
The fictional/literary figure who consecrates the hero takes advantage of the confines, mysteries and largesse of a tradition inherited from legends, myths (Greco-Latin mythology, Indian mythology, etc.) and the history of peoples (Greek, Latin, Indo-European, Prussian, etc.) to open up a varied typology, a spontaneous taxonomy and a ritual criteriology.
If the literary eighteenth century does not embroil novelistic heroism in radical iconoclasm, it is the reservoir of history from which an avalanche of young figures in action within narratives emerges. Whether literary or philosophical, these narratives are built around and with relatively young characters on a mission in the lair of an often strange or alien society. These a priori problematic spaces inform a series of discoveries that make no secret of the chaotic or accidental trajectories of the young heroes: Julie or the New Heloise, Candide, Zadig, Jacob, the Chevalier Des Grieux or Manon Lescaut…
At the end of the century, German literature, with Goethe (Wilhelm Meister’s Years of Apprenticeship – 1794-1796) and Schlegel, introduced new figures of the young hero and forged the notion of the bildungsroman. The counterpart in France was the novel of apprenticeship, and its variants (novel of training or education, etc.). The result was a series of novels forged around the notion of a problematic quest for oneself in the midst of a troubled century and within societies that were, for the most part, in the process of becoming. Werther, then Wilhelm, left a strong imprint on German history, with their unprecedented youthful experiences spreading across the whole of Europe. This new aesthetic became more widespread in French literature, where the Romantic connotation took on greater significance with the development of characters such as Frédéric Moreau, Charles Bovary, Renée, Julien Sorel, Octave, Lucien de Rubempré, Eugène de Rastignac… The specificity of these characters was that they embodied the youth of their time, resolutely marked by a concern for social integration. The descriptive rhetoric and narrative verve play on the relative youth of these fragile and vulnerable characters barely out of childhood, most often from humble origins (commoner, working class) and thrown into the hell of a society of interests : These young characters are confronted with the illusion of a fulfilment that takes various trajectories, the cruellest of which are the abyss, disillusionment, bitterness, despair, abandonment; and on rare occasions, the felicity of a success, variously varied… These characters rehash through experience and lived experience, the empirical foundation of the generations of the eras through which they pass. They embrace the happy and unhappy memories and experiences of love, joy, poverty, disappointment, naivety, belief, abundance and scarcity, all of which mark out the space of learning.
The novelistic game manipulates characters, spaces and time, and lends itself as an inexhaustible source of aesthetic exploitation, with novelists assigning them particular functions in the course of these formative-learning experiences of the young hero, whose naivety and first tentative steps towards success or failure create a singular attachment in the reading contract. As soon as they are linked to the question of the evil of the century (in the 19th century) understood as a dream of heroism fatally condemned to marginality, to the nostalgia of a sacrificed youth, anguished by the premature rise of withering, and to the disgust of existence, these young characters border on constructive empathy. The twentieth century calls into question the place of training and apprenticeship in the journey of the young hero. At a time when human rights are taking precedence over a number of social practices, we need to ask ourselves what figures would sustain the formation of the young hero in stories. Already at work in the nineteenth century with Jules Vallès (L’Enfant, L’Insurgé, Le Bachelier: Mémoires d’un révolté trilogy), the hero’s suffering takes many forms in the complex bonds of family relationships, social acquaintances, sentimental experience and training, in the quest for affirmation and fulfilment. It is a father who weighs down the character with unbridled authoritarianism and suffocating brutality (Julien Sorel,…), a mother, or even the head of a convent or foster family, who lacerates the conduct of a character found to be indelicate; or again, a social relationship that imposes itself through charisma and education (Vautrin). Jean Paul Sartre or Marguerite Duras return to these issues of a painful childhood perverted by parents, « legal guardians » and/or circumstantial (blended families), and most of the time, lost in the quest for social fulfilment that haunts every young mind…century. The young hero thus presents a protean profile which, from the eighteenth to the twenty-first century, lies at the heart of many host societies without ever being able to carve out an authentic, linear and structured path of action centred on the quest for self. Somewhere between myth, legend and convention, he finds himself caught in the vice of a historically contagious determinism of disintegration, tearing apart and impoverishment, all at the service of a severe decline of heroism in the aesthetic game.
L’importance de cette thématique dans les préoccupations littéraires a suscité, ici même à Korhogo, un livre collectif, à notre initiative. En suivant la chronologie des exemples retenus, le lecteur remarquera qu’une extraordinaire effervescence créatrice donne corps à un nombre important du mythe. Des figures héroïques nourrissent toujours la culture de masse à travers la littérature, le septième art, la bande dessinée… Elles projettent chacune une histoire et des caractéristiques essentielles que l’on découvre dans ce livre collectif. Ainsi, d’un auteur à un autre, le thème est perceptible par des conceptions ou variations lui donnant des apparences toujours nouvelles. Comme le sujet traité l’imposait, les auteurs des articles rassemblés ici sont généralement de formation littéraire ; cependant, les méthodes d’approche ne sont toujours les mêmes. Sessia Inesse Bohoun propose du héros juvénile une image vivante de faiblesse humaine capable de se reconnaître et de se retourner contre elle-même dans un geste de liberté désespérée. Comme Oedipe dont la moralité pourrait paraître douteuse, le Vicomte de Valmont dans Les liaisons dangereuses de Choderlos De Laclos est défini comme le héros érotique le plus emblématique des personnages libertins des Lumières. Ancien amant et complice de la marquise de Merteuil, il a la particularité d’être beau et de mener une vie de libertinage amoureux. Pour lui, la femme est une proie que l’on dérobe à l’autre autant qu’à elle-même. Analysant Ruy Blas de Victor Hugo, Simplice Nogues Godo part du postulat que l’espace dramatique est susceptible de jouer un rôle majeur dans la lisibilité du mythe. Dans ce drame romantique, écrit en cinq actes et en alexandrins où des personnages tentent vainement d’échapper au destin fatal auquel ils sont soumis, le critique détermine le palais royal et la sombre petite chambre tels des trajectoires à la fois tragique et génératrice d’héroïsme ; car, la représentation scénique des relations entre les personnages favorise la confidence personnelle du héros.
Gnagny Pedro Kennedy’s analysis articulates epic heroism and courtly chivalry in Marcel Devic’s Antara. Based on this great mid-nineteenth century epic, we see that Arab epic heroism, unlike that of the West, takes no offence at love or self-sacrifice for women. The interaction between Antar and his community, and then with women, helps to create a hybrid hero who defies the classic canons of epic heroism. Louis Briga, for his part, uses Georges Molinié’s interpretive stylistics to characterise a number of references to the character of Jean Peyral in Pierre Loti’s Le roman d’un spahi. The stereotypical discursive referentiality of the young hero from the Cévennes is no more than an enunciative pretext for Loti, whose discourse consists in intentionally painting a primitivist picture of Africa in black. His analysis leads to the conclusion that the hero is not necessarily defined by objective moral qualities, but could also be singled out from his contemporaries by an insolent difference. Marc Arthur Sémien’s significant contribution is a study of the heroic journey of Raphael de Valentin in Honoré de Balzac’s La peau de Chagrin. This hero, whose existence is terrified by the power of a skin who takes fragments of his youth with him, is doomed to the same despair that gnaws at his « brothers » in La Comédie humaine: Vautrin and his pupils Rastignac and Lucien de Rubempré. He must fight his new addiction if he is to avoid the fulfilment of this strange and disturbing prophecy. The disenchantment of the characters of the Parisian world at the end of the 19th century returns in the work of Wato Pierre Lieu, who praises Balzac’s Eugène De Rastignac and Maupassant’s Georges Duroy in Le père Goriot and Bel-Ami respectively. Perfectly embodying their era, these young heroes are characterised by their charisma and their genius: handsome, elegant and well-educated, they appeal to women and use their charm to rise to the top of « good society ». The infamies and secret weaknesses of these « young wolves with long teeth » confirm the idea that a hero is not always a man of good faith or immaculate. However, there is always something sunny and dazzling about the figure of the youthful hero, which I express by highlighting the devotion and probity of the young servants in Jules Verne’s work. The heroic epiphany of these faithful companions is characterised by their rare virtues, which could be compared with Plato’s view that heroism is a generous ardour, a gesture of love. In The Banquet, this illustrious philosopher considers – starting with Alcestis, who agrees to die for her husband – that the root of the word « hero », « hêrôs », is of the same origin as that of « love », « êrôs ». It follows that heroism manifests itself in a gesture of love, in sacrifice, in the trouble a person goes to in order to help others.Inviting us to follow the journey of Birahima in Ahmadou Kourouma’s Allah n’est pas obligé, Anoh Brou Didier’s article clearly corroborates the sacrifice of the typical hero. The analysis highlights the strength of character and bravery that « a man is no more than another if he does no more than another ». Freed from parental guardianship at an early age, Birahima rebelled against the rigid models imposed by his society. Like other children engaged as combatants in African civil wars, his journey prefigures the prototype of the child soldier in post-colonial African writing. The child soldier is at the heart of a struggle, a social struggle, but his virtues remain diverse and sometimes antagonistic, as demonstrated by Kouakou Brou Médard’s reflection on a film by Anton Vassil entitled Le gendarme d’Abobo (The Gendarme of Abobo). Based on a comic film made in 2019, the critic bases his argument on theories relating to filmic transposition to identify the dual posture of the main character. In his view, Chief Warrant Officer Gohou reconciles two opposing axiological poles: he is at once an anti-hero and a heroic character. He thus reconsiders the ambivalent character of the hero, which Boussou Amany Hypolite picks up on in his article entitled: « Le héros-jeune: histoire, expériences et avatars esthétiques dans Le monde s’effondre de Chinua Achebe ». Using a sociocritical approach fundamentally imbued with an imaginary of failure, fate and tragedy, the researcher describes the curve of Okonkwo’s meteoric rise among his people, which unfortunately ends in a loss, or even a vertiginous fall, leading to his death by hanging. The heroic figure undergoes a critical decline, making it clear that « the story of a life, whatever it may be, is the story of a failure ». (J. P. Sartre, 1946, p. 561). Kessé Edmond N’Guetta’s study of the youthful Choukrien hero and the avatars of sexuality focuses on the moral decline of the literary hero. Le pain nu explains this devaluation well, insofar as it features a young hero dragged through all the fairs of life. Degraded by a deviant sexuality, he finds himself impoverished, stripped of his rich meaning.
Nounangnon Judith Bidouzo Sognon-Des’s contribution reveals that heroism in Hampaté Bâ has an esoteric, spiritual and religious basis. Her analysis reveals a typology of heroes whose profile reveals an ideal of social and political life, in the background of which is tacitly perceived an intention to teach through symbols inspired by oral tradition. Boadi Désiré Ano and Roger Kpan Gueu, for their part, start from the premise that there is a postmodern African novel whose essence, identity and aesthetic are based on a global disruption of the forms of writing. They subject the hero of Alain Mabanckou’s Verre Cassé to a game of strangeness, heroic de-legitimisation and fragmentarity. Their analysis attests to the actorial postmodernity and the hero’s adherence to the breaking of classical codes. Sympathetic and disconcerting, their corpus presents an archipelated identity of the novelistic hero and succumbs to the artifices of intermediality. In « La mort programmée du héros dans le roman de Thierno Monénembo… » (The programmed death of the hero in Thierno Monénembo’s novel), François Konan Koffi argues for a rewriting of the juvenile novelistic hero in crisis. His hero is an adolescent in decline, whose acting is based on an addiction to parody, caricature and simulacra.
For his part, Kpatimbi Tyr looks at recent forms of heroism in French-language literature south of the Sahara. His analysis is based on L’Initié by Olympe Bhêly-Quenum. The heroes he portrays have characteristics of ancient Greek heroes: Djessou symbolises darkness, Evil, while Marc Tingo symbolises light, Good. During the battle between them, Marc Tingo finds the opportunity to surpass himself, because he is endowed with a rationalist vision that enables him to control himself, maintain his composure and stand out for his extraordinary value. Timbo Adler YRO uses a geocritical approach to deal with the figurative chronosemia of the hero in Véronique Tadjo’s work. He shows that Véronique Tadjo’s heroes embody roles that marry real-life personalities.
Finally, Mawa Romaine Sondjo presents Benin’s popular theatre as a national hero, thanks to the major events it has represented in socio-political life and the trophies its troupes and actors have won. She praises its exceptional career, showing its capacity for adaptation, its varied forms and its diverse content, before dwelling on its implications in the consolidation of an independent nation. Drawing on the sociocritical method, the author sets out to highlight the heroic nature of this naturalistic form of drama, which is both traditional and modern, and which has endured for decades despite the difficulties encountered by its practitioners.
Dr Escoffier-Ulrich KOUASSI